Internationale Kulturwissenschaften
International Cultural Studies
Etudes culturelles internationales

Sektion III: Neue wissenschaftliche Institutionen

Section III:
New Scientific Institutions

Section III:
Nouvelles institutions scientifiques


Peter Morgan (Perth) [BIO]

Anglais 
Etudes inter- et transculturelles dans le contexte australien: L’élément de réflexion introspective

 

Introduction

Pour Samuel P. Huntington, l’Australie est traditionnellement un pays occidental à la périphérie de différentes régions culturelles qui essayent de rejoindre leur plus grand voisin géopolitique régional, l’Asie (The clash of cultures, 1955). Située entre l’Asie et les régions du Pacifique, à la bordure de l’Océan Indien, socialement et culturellement en majorité européenne, l’Australie s’est engagée dans un débat permanent sur son identité et sa place dans le monde. Dans cette perspective, la réapparition spectaculaire de l’Europe en 1989 coïncide avec un débat important sur l’identité nationale et culturelle de l’Australie.

Dès le début des années 70 qui ont marqué une nouvelle orientation culturelle vers les USA et une orientation géopolitique vers l’Asie se faisait jour, l’Australie est passée par un processus de ré-alignement politique et culturel. Ce processus est arrivé à maturation en 1989. L’Australie a pris conscience de manière critique des problèmes de sont identité nationale en raison du mécontentement qu’ont suscité les tentatives faciles et politiquement opportunistes de re-situer l’Australie en Asie. De surcroît, la deuxième génération de réfugiés et d’immigrants de l’après-guerre voyaient leurs parents, qui avaient leur racines linguistiques et culturelles en Europe, vieillir et mourir. Ces facteurs et d’autres ont contribué à une nouvelle prise de conscience des liens de l’Australie avec l’Europe, liens qui avaient été négligés et risquaient de tomber dans l’oubli..

Dans le dernier texte que j’ai soumis dans ce même cadre institutionnel (Innsbruck 1997), j’ai évoqué les changements intervenus en Australie au cours des deux dernières décennies dans l’enseignement des langues et littératures européennes à la suite de ces mutations globales et internes. Dans le présent texte, je reprendrai un certain nombre de ces points sous un autre angle, en posant la question suivante: Comment mettre à profit les nouveaux paradigmes intellectuels trans- et interculturels avec leurs nouvelles technologies et structures institutionnelles (p.ex. "Wissenschaftsorganisation") afin d’optimiser les échanges mutuels productifs d’information et de compréhension à travers les frontières nationales et supranationales qui se sont formées la fin de la période de l’après-guerre.

L’élément de réflexion introspective dans les études inter- et transculturelles

Après une période de déclin, l’ancienne structure des sections "langues et littératures européennes" a été remplacée par un nouveau modèle d’études européennes, où un paradigme d’un concept plus large "d’études culturelles" vient compléter une "approche communicative" de l’enseignement des langues et compétences linguistiques. Ce paradigme d’ "études culturelles" pour la compréhension de l’Europe est apparu en réponse à trois vecteurs interdépendants: les mutations dans le contexte global de la compréhension mutuelle après la fin de la période de l’après-guerre, l’accession de l’anglais à une position dominante en tant que "langue globale" pour l’avenir immédiat (accompagné de la vision que l’anglais puisse être suffisant pour toute étude, même celles d’autres cultures) et l’impulsion théorique venue des paradigmes américains post-structurels ou post-modernes. Les pressions en faveur d’un changement étaient symptomatiques et en ligne avec un ensemble de nouveaux facteurs globaux et locaux. La poussée vers un modèle d’enseignement et de recherches du type "Etudes européennes" est mieux adaptée aux besoins des étudiants australiens et de la société australienne en général. Nous parlons ici d’un changement de paradigme relatif à l’organisation de la recherche et de l’information sur l’Europe qui passe d’un modèle national à un modèle interdisciplinaire d’études de toute une région. Un des aspects clés de ce nouveau modèle réside dans le fait que les formes de critique littéraire et culturelle reconnues au plan national sont soumises à un examen critique de l’extérieur qui, de manière générale, n’aurait pas été admis dans les structures traditionnelles; une nouvelle différentiation peut être faite entre l’enseignement de littératures et cultures nationales particulières de l’intérieur et de l’extérieur. L’Australie a développé une nouvelle vision de l’Europe (et du monde) à la suite du changement global des dernières décennies et a entamé un processus de transformation des structures intellectuelles, des institutions et des technologies, afin de permettre le maintien de cette nouvelle perspective critique et transculturelle.

"Perchée sur l’Océan Indien à l’ouest et sur l'Océan Pacifique à l’est" avec sa côte nord "tournée vers le sud-est asiatique" et en particulier vers l’Indonésie, la Malaisie et Singapour, avec des liens trans-pacifiques avec la côte occidentale des Etats-Unis et du Canada, "tremplin des Européens vers l’Asie" et avec de gros intérêts même au sud dans les ressources antarctiques piscicoles, minières et d’environnement....... ces clichés nationaux, industriels et commerciaux montrent bien que l’Australie a développé une nouvelle manière de penser et de parler de ses relations avec le reste du monde. Mais qu’en est-il des nouveaux problèmes de sa compréhension de "soi-même" et des "autres", implicite dans le discours du positionnement global et qui peut si facilement être ignoré dans la course à la richesse dans un environnement globalement compétitif ?

Si les Australiens ont changé leur manière de s’informer sur le reste du monde, et en particulier sur l’Europe, il n’est pas évident qu’ils aient créé en parallèle les canaux pour informer le reste du monde sur eux-mêmes et pour qu’il s’engage dans des échanges avec l’Australie. A mon sens, cette collecte d’information et ces échanges font partie d’un processus menant vers une compréhension mutuelle sur la base de connaissances détaillées et fiables " de l’ensemble du mode de vie particulier d’un peuple ou d’une société (UNESCO, Notre diversité créative). En ces termes, "informer" signifie faire partie d’un processus sous forme de dialogue, d’échanges à tous les niveaux, y compris la compréhension culturelle, la collecte de connaissances et la réflexion critique et analytique qui ne se contente pas de réunir tout simplement des ensembles statiques et déifiés d’informations.

Si l’Australie veut participer pleinement aux nouveaux paradigmes de compréhension globale, elle ne pourra pas se contenter simplement de susciter une compréhension inter- et transculturelle de la culture, elle devra également intégrer dans ces nouveaux paradigmes ("Wissenschaftsorganisation") un élément de réflexion introspective par lequel faire comprendre au reste du monde ce qui se passe en Australie. Car sans cela, il n’y aura pas de dialogue.

Mon texte précédent s’était concentré sur la manière dont la recherche sur l’Europe s’effectue en Australie, une partie du monde extérieure à l’Europe, avec une vision de l’Europe et un intérêt pour l’Europe qui se distinguent de ceux des Européens eux-mêmes. A la suite des événements de 1989, des progrès de l’Union européenne, l’Europe est "conçue à nouveau" de l’extérieur dans un environnement dominé par "l’anglais comme langue globale" (David Chrystal) et dans un monde dans lequel des modèles sous- et supranationaux jouent dans l’étude comparative des cultures un rôle croissant à côté des modèles nationaux.

Notre tâche en tant qu’enseignants et chercheurs australiens est de fournir aux étudiants une compréhension intégrée et cohérente de l’Europe de notre point de vue (australien). Il faudra pour ce faire examiner, définir et conceptualiser de manière critique l’importance de l’Europe pour l’Australie.

Dans le présent texte, je m’intéresse au corollaire de cette approche, à savoir comment créer des structures qui permettent de rendre accessible aux autres un processus d’information culturelle significative et valable, de manière à ce qu’il y ait un feed-back vers l’Australie de visions venues d’ailleurs. Comment les Australiens peuvent ils créer des mécanismes leur permettant de recevoir la vision des autres. Nous n’avons pas seulement besoin de savoir quel est le regard critique que les Européens jettent sur l’Australie, mais il nous faut aussi mettre en place les mécanisme qui permette de recevoir, de diffuser, de prendre en considération et de discuter ces informations. Ceci implique à la fois

Ces processus sont essentiels pour que les études trans- et interculturelles puissent fonctionner comme un nouveau paradigme dans le contexte contemporain du partage de l’information dans l’esprit du rapport de l’UNESCO, Notre diversité culturelle. Une approche d’études culturelles centrées sur l’Europe devrait, dans cette otique, inclure une composante de réflexion introspective, qui aurait pour but de sensibiliser les étudiants australiens à la nécessité d’un dialogue, à la nécessité de s’expliquer à eux-mêmes afin de comprendre les autres, et de comprendre les autres afin de s’expliquer à eux- mêmes.

Les étapes des trans- et interculturelles

Dans la mesure où l’Europe a existé comme partie "l’institution imaginaire" (Cornélius Castoriadies) de la société australienne depuis l’établissement des blancs, ce processus de dialogue a été une élément clé dans la formation de l’identité australienne. Les thèmes clés de la réflexion introspective australienne dans le cadre de ce paradigme d’études culturelles comprendrait, dans cet esprit, des thèmes tels que:

L'Europe et les identités qui la constituent ont été présentes dans la culture australienne depuis les débuts de l'établissement des blancs. Cependant, ceci n'a pas toujours été reconnu. Encore en pleine période d'après-guerre, les histoires standards et les principales institutions politiques, culturelles et éducatives présentaient l'Australie comme un pays à prédominance britannique, bien que la culture populaire montrât déjà à cette époque des signes d'une bien plus grande diversité culturelle. Dans les années 1970 est apparue une forme de "multiculturalisme", particulière à l'Australie, qui reconnaissait cette réalité de la société Australienne. Ce multiculturalisme a atteint son sommet au milieu des années 1980, époque à laquelle la demande d'une nouvelle reconnaissance de l’identité australienne dans toute sa diversité à commencer à émerger.

La tradition de réflexion introspective sur l’Européanité de l'Australie fait donc partie de l’identité australienne moderne, bien que les structures qui permettent de maintenir cette réflexion soient continuellement menacées d’un processus d’usure de la conscience interculturelle, en particulier à la mesure que l'Australie devient de plus en plus monolingue. Les intellectuels australiens montrent toujours ce genre d'insularité, d'arrogance monolingue et de repliement sur eux-mêmes qui caractérise la plupart des paradigmes nationaux littéraires et culturels. En outre, il existe une tradition post-coloniale de "servilité culturelle", une histoire de "complexe d'infériorité", ainsi qu’une anxiété alliée à un rejet par rapport aux visions extérieures de l'Australie. L’enseignement et la recherche de la littérature et de la culture australienne doivent se soumettre à un processus permanent de ré-conceptualisation, de reformulation et de réorganisation afin de surmonter ces trois déterminantes historiques.

Les réactions et attitudes ouvertes à l'égard de représentations venues de l'extérieur sont rares et les mécanismes qui pourraient faciliter et maintenir cette ouverture d'esprit demandent à être développés. Le multiculturalisme australien ne suffit pas en soi pour maintenir les canaux de communication trans- et interculturels entre l'Australie et l'Europe. Ceci aussi est devenu un paradigme "national".

Les différentes étapes pour la mise en route d'études plus autocritiques, dynamiques et de dialogue trans- et interculturels en Australie devraient passer par les changements suivants:

Résume: L’Australie comme étude de cas

Les programmes trans- et interculturels d'études doivent tenir compte des développements politiques et socioculturels et comporter également des enseignements des corpus agréés de matériel littéraire et culturel. Par ailleurs, ces programmes devront être enseignés à partir d'une prise de conscience et d’un engagement critique par rapport aux intérêts nationaux, aux objectifs, idéaux, aspirations et paradigmes de réflexion introspective. Ce dernier point à été au centre de ce document qui se sert de l'exemple australien pour illustrer la nécessité d’introduire dans les paradigmes des études culturelles nationales non seulement inclure un élément de réflexion introspective, mais aussi de créer et de maintenir des mécanismes pratiques qui permette à cette réflexion de surmonter la tendance à tomber dans le modèle de pensée insulaire qui s’auto-perpétue.

(Traduction: Gertrude Gréciano)



Internationale Kulturwissenschaften
International Cultural Studies
Etudes culturelles internationales

Sektion III: Neue wissenschaftliche Institutionen

Section III:
New Scientific Institutions

Section III:
Nouvelles institutions scientifiques

© INST 1999

Institut zur Erforschung und Förderung österreichischer und internationaler Literaturprozesse

 Research Institute for Austrian and International Literature and Cultural Studies

 Institut de recherche de littérature et civilisation autrichiennes et internationales