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"Interkultureller" Austausch, transkulturelle Prozesse und Kulturwissenschaften | |
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"Intercultural" Exchange, Transcultural Processes and Cultural Studies | |
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Echange interculturel, processus transculturel et études culturelles |
Ugur Güven (Izmir) (*) |
"Le
fondement de la République turque,
c'est
la culture."
Mustafa
Kemal ATATÜRK
Au Moyen Age occidental, l'image de l'étranger était associée à l'exclu au même titre que l' hérétique, le lépreux, le Juif, le sorcier, le sodomite, l'infirme, le déclassé. La chrétienté médiévale considère l'étranger comme un intrus qui n'appartient pas aux communautés connues. Saint Louis, dans ses Etablissements, le définit comme "homme méconnu en la terre". En 1219, un statut de Goslar met dans le même sac "histrions, jongleurs et étrangers". L'étranger, c'est donc "celui qui n'est pas fidèle, un sujet, celui qui n'a pas juré obéissance, celui qui, dans la société médiévale, est ‘sans aveu'". (Le Goff, 1982, 296-297)
Si l'on remonte plus loin, le mot barbaros ne signifie pas barbare au sens où nous l'entendons aujourd'hui, c'est-à-dire par opposition à civilisé, mais au temps d'Hérodote jusqu'à l'avènement du christianisme, le mot a un sens strictement linguistique. Il signifie celui qui ne parle pas grec ou celui ne comprend pas le grec. Déjà Homère utilisait le terme barbarophones -de langue barbare- pour un peuple, les Cariens, vivant en Asie Mineure et dont les coutumes étaient pratiquement celles des Grecs. Chez Hérodote, "barbarizo: je barbarise" signifie "je parle une langue non grecque" ou "politiquement je prends à Athènes le parti des Mèdes et des Perses". (Lacarrière, 1981, 9-10)
De nos jours, l'étranger, c'est celui "qui est d'une autre nation; qui ne fait pas partie d'une famille, d'un groupe; qui n'appartient pas à la chose dont on parle; qui n'est pas connu; qui ne connaît pas". (Le Larousse, l'article "étranger")
Quant au terme culture, devenu à peu près synonyme de civilisation, il désigne l'ensemble des traditions, des techniques et des institutions qui caractérisent un groupe humain. D'après Sapir, la culture c'est "l'ensemble des attitudes, des visions du monde et des traits spécifiques qui confèrent à un peuple particulier sa place originale dans l'univers." La culture ainsi comprise est normative et acquise par l'individu dès l'enfance par le processus d'acculturation.
Dans ce sens, les études culturelles, véhiculées surtout par la langue dans son emploi social, acquièrent une importance capitale. En apprenant une langue étrangère, on apprend en même temps une culture étrangère. Mais cette culture n'est étrangère que par rapport à sa propre culture, toujours présente dans sa mémoire et dans des situations de communications différentes. Ainsi une langue étrangère n'est étrangère que par rapport à sa langue maternelle, toujours présente dans les processus d'acquisition, d'apprentissage et d'utilisation et dans des situations de communication différentes.
L'apprentissage, l'acquisition et l'utilisation d'une langue étrangère ne sont pas seulement un but en soi, la langue et l'utilisation de cette langue font partie de la culture d'un pays. L'enseignement de langue inclut donc essentiellement deux composantes. La première qu'on appelle la compétence linguistique doit développer les quatre compétences: compréhension orale et écrite, production orale et écrite. La deuxième, -qui constitue notre objectif-, qu'on appelle la compétence socio-culturelle a pour pour but de faire connaître les éléments de la culture dont on apprend la langue. La complémentarité de ces deux compétences, -langue et culture,- est formulée par Georges Mounin comme suit: "Pour pénétrer la civilisation mieux vaut savoir la langue, et pour se perfectionner dans la langue, il faut se familiariser toujours plus avec la civilisation." (Mounin, 1984, 35)
Au seuil du troisième millénaire, les progrès de la technologie, de la communication et de l'information introduisent une culture planétaire. Mais contrairement à ce que l'on s'attend, les particularismes ethniques, nationaux ou régionaux continuent d'émerger en se contredisant. Les représentations que l'on se fait d'une culture sont très souvent déterminées par des idées toutes faites, des jugements de valeurs, des hypothèses ou des images affectives liées aux rapports historiques, politiques et économiques entretenus avec le pays.
Nous voudrions citer ici une enquête réalisée récemment auprès de 2200 jeunes, dont l'âge varie entre 15 et 22, et un grand nombre (41.5 %) ont fini leurs études secondaires, connaissent l'anglais comme langue étrangère, et 50 % ne connaissent aucune langue étrangère, en Turquie et qui s'intitule "La jeunesse turque 98, la masse silencieuse sous la loupe". Une des questions avait pour but d'évaluer dans quelle mesure les jeunes partageaient les préjugés sociaux. Il leur est demandé de préciser ce qu'ils pensent d'une série des groupes ethniques, sociaux ou politiques sur une échelle de quatre choix:
"a) Il n'y en a pas de bons.
b) La plupart sont mauvais, mais il y en a de bons
c)La plupart sont bons, mais il y en a de mauvais.
d) Il n'y en a pas de mauvais."
Le résultat de l'enquête montre en effet que:
les francs-maçons (54.4 %),
les homosexuels (53.5 %),
les athés (50.7 %) occupent les trois rangs du premier choix. Ils sont catégoriquement exclus.
Ensuite viennent:
les Grecs (45.5 %),
les Arméniens (44.2 %) et
les Juifs (40.5 %).
Quant au troisième choix, il nous révèle les groupes que les jeunes trouvent plutôt bons:
les Noirs (47.6 %),
les Chî-ites (55.1 %),
les Français (47.6 %),
les Allemands (47.3 %),
les Roumains (44.7 %),
les Américains (44.6 %) et
les Arabes (42.3 %). (Türk Gençligi 98, Suskun Toplum Büyüteç Altinda, 1999, 70-71)
Sans approfondir notre analyse, nous pouvons constater le poids des préjugés sociaux, ethniques, religieux, etc. chez les jeunes. Une nouvelle enquête après le séisme qui s'est produit le 17 août 1999 dans la région de Marmara, et qui a bien frappé toute la Turquie, pourrait infirmer ces résultats.
Quant à la langue, elle joue un rôle déterminant dans le statut de l'étranger. Au Moyen Age, la diversité linguistique est considérée comme un malheur, une des conséquences du péché originel. Dans l'histoire de Meier Helmbrecht, on voit des paysans allemands qui ne reconnaissent plus, à son retour, leur fils prodigue qui parle plusieurs langues. (Le Goff, 1982, 253-257) L'objectif des études linguistiques est de converser, de partager, de communiquer avec l'autre, avec l'étranger. Si cet apprentissage n'est pas étroitement lié à la culture, la signification des mots, des faits va échapper. On donnera une signification aux mots, aux gestes, aux mimiques que les natifs utilisent dans un autre sens.
A ce titre, nous voudrions citer encore ici une autre enquête, que nous avons effectuée en 1996 auprès de nos étudiants. En effet nous avions remarqué, pendant notre atelier de théâtre, que nos étudiants s'exprimaient en langue française en utilisant les gestes et les mimiques de leur langue maternelle. Les résultats de cette enquête nous ont révélé que même ceux qui avaient passé plus d'une dizaine d'années en France ne pouvaient pas décoder les mimiques et les gestes que les Français utilisent fréquemment.
La compréhension d'une culture donnée nécessite donc une tâche énorme du fait de sa complexité et de son ambiguïté. Pour aborder les réalités culturelles en dépassant les frontières tracées par les préjugés, les généralisations rapides et les stéréotypes arbitraires dans les études culturelles, nous pensons avec Francis Débyser qu'il faudrait adopter simultanément trois approches complémentaires:
1) L'approche sociologique, basée sur les données des sciences sociales;
2) L'approche anthropologique, basée sur les réalités plus concrètes, plus individuelles et plus quotidiennes;
3) L'approche sémiologique, qui mettra en valeur non pas seulement les dénotations mais aussi les connotations culturelles, les représentations collectives, les mythes, etc. (Débyser, 1981, 9-21)
On peut toujours commencer les études culturelles par les idées toutes faites à l'égard d'un fait culturel, ce qu'il représente, comment il est envisagé de l'étranger pour le confirmer ou infirmer par la suite, ce qui permettra dès le début une sensibilisation tout à fait particulière.
En conclusion, il va sans dire que l'identité culturelle d'un individu ou d'un groupe social est déterminée par les réalités locales. Les attitudes, les mentalités, les sensibilités se forment au fil des siècles sous l'influence de ces réalités sociales, historiques, philosophiques, etc. D'autre part, chaque individu a plusieurs identités qui vont de son environnement immédiat à l'universel et qui sont parfois contradictoires. L'accélération de l'histoire met en place une culture globale devant laquelle nous avons une sorte de vertige. Il y a des cultures qui pèsent, des cultures qui se sentent menacées, des cultures qui se rapprochent. C'est inéluctable. On peut aisément créer des barrières entre différentes cultures si on se centre sur ces divergeances qu'on trouve à l'origine de toutes sortes de conflits. L'enjeu est une question de mentalité. Et les études culturelles ont dans ce sens une tâche énorme à remplir à la fois complexe et ambiguë mais aussi précieuse pour l'avenir de l'humanité, si elles réussissent à intégrer la différence comme un facteur de rapprochement.
REFERENCES BIBLIOGRAPHIQUES
Francis DEBYSER, "Lecture
des civilisations" Moeurs et Mythes, Paris, Hachette-Larousse,
1981.
Jacques LACARRIERE, En cheminant avec Hérodote,
Paris, Seghers, 1981.
Jacques LE GOFF, La Civilisation de l'Occident médiéval,
Paris, Flammarion, 1982.
Georges MOUNIN, (entretien avec)" Sens et place de la
civilisation dans l'enseignement des langues", Le
Français dans le monde, No:188, Paris, Hachette-Larousse,
1984.
Edward SAPIR, Selected Writings in Language, Culture and Personality,
Berkeley, University of California Press, 1949.
Türk Gençligi 98, Suskun Toplum Büyüteç
Altinda, Ankara, Konrad Adenauer Vakfi, 1999.
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