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Internationale
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Sektion IV: | Kulturwissenschaften und neue Informationsprozesse | |
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Cultural Studies and New Information Processes | |
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Etudes culturelles et nouvelles formes dinformation |
Ulrike Stroeder (Le Mans) |
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Les systèmes d'enseignement supérieur en Allemagne et en France ont connu des réformes semblables pendant les trente dernières années. Ainsi, pendant les années soixante, des enseignements supérieurs courts à caractère professionnalisant ont été créés dans les deux pays: les Instituts universitaires de technologie (IUT) en France et les Fachhochschulen (FH) en Allemagne. Si ces réformes ont des objectifs similaires, les conceptions des nouveaux enseignements sont propres à chaque pays et intègrent certaines spécificités du fonctionnement de la société et du système éducatif. En raison des différences sociétales, les nouveaux enseignements évoluent donc de façon différente.
Dans les deux pays, on assiste, pendant les années cinquante et soixante, à une différenciation dans l'enseignement supérieur avec la création d'un enseignement supérieur court. La raison principale de cette réforme est l'essor économique en Europe après la Deuxième Guerre Mondiale et la transformation de la structure de l'économie et de l'emploi. Entre 1960 et 1965, l'OCDE publie différents rapports qui prévoient des besoins croissants en main-d'uvre qualifiée dans l'industrie, le commerce et l'administration pour faire face au progrès technique et à l'évolution des métiers qui en résulte. En effet, comme conséquence de la spécialisation des fonctions dans les entreprises se développe, à côté des fonctions dirigeantes des grandes entreprises, un encadrement intermédiaire chargé des fonctions opérationnelles. Les rapports de l'OCDE ont un impact considérable dans de nombreux pays européens qui mettent alors en place une politique incitant les jeunes à prolonger leurs études et à améliorer ainsi leur niveau de formation. Le nombre de bacheliers augmente donc fortement et encombre les universités. Pour cette raison, une plus grande différenciation des structures de l'enseignement supérieur devient nécessaire. Elle se traduit par la création d'un enseignement supérieur court à caractère professionnalisant, pour accueillir un plus grand nombre d'étudiants et pour préparer spécifiquement aux fonctions d'encadrement intermédiaire.
La France est confrontée plus tôt que l'Allemagne à une pénurie en cadres commerciaux et en ingénieurs en raison de la dichotomie de son système d'enseignement supérieur. D'un côté, l'Université - un enseignement de type ouvert - prépare avant tout aux professions libérales et forme des enseignants. De l'autre côté, l'enseignement supérieur technique et professionnalisant, constitué des grandes écoles et des écoles supérieures de différents niveaux pour la formation des ingénieurs et des dirigeants commerciaux, est de type fermé, le nombre des diplômés étant très limité en raison d'une sélection à l'entrée. C'est pourquoi la création de nouvelles écoles supérieures ne suffit pas à répondre aux besoins croissants, d'autant plus que certaines de ces écoles - avant tout les écoles de commerce - sont payantes et donc réservées à une couche sociale aisée.
Ainsi, à partir de 1966, des cursus universitaires courts sont créés. Les IUT, Instituts universitaires de technologie, sont rattachés à une université ou à un centre universitaire et ils ont pour objectif de former en deux ans des techniciens ou des commerciaux immédiatement opérationnels et adaptés aux besoins des entreprises. Les IUT non seulement exigent le baccalauréat mais sélectionnent sur dossier en raison du nombre limité de places. Le nouveau type d'enseignement est donc également de type fermé et reproduit ainsi dans une certaine mesure le modèle de référence des écoles supérieures.
Alors que d'autres pays ont commencé dès les années cinquante à démocratiser et à horizontaliser leur enseignement secondaire et supérieur(1), le système d'enseignement en Allemagne après la Deuxième Guerre Mondiale reste longtemps fortement hiérarchisé et cloisonné. L'ensemble du système est structuré par rapport à une polarisation entre, d'une part, l'enseignement universitaire conceptuel et orienté vers la recherche et, d'autre part, la formation professionnelle en alternance, appelé système dual, valorisant la pratique tout en négligeant le niveau d'enseignement général(2). La formation strictement scolaire de l'enseignement professionnel joue en Allemagne un rôle beaucoup moins important qu'en France alors que l'implication des entreprises dans la formation professionnelle est plus forte(3). Malgré son apparence très cloisonnée, ce système garantit une relative mobilité sociale, en permettant aux personnes ayant suivi une formation en alternance de gravir progressivement des échelons et d'accéder ainsi à des postes à responsabilité que l'on peut qualifier d'encadrement intermédiaire ainsi qu'aux fonctions dirigeantes d'une PME. Ce système réussit mieux que le système scolaire français à absorber la demande supplémentaire en main-d'uvre qualifiée. Cependant, il n'est plus tout à fait adapté à une société où la technologie prend une importance croissante. En regard du progrès, la formation générale et théorique des ingénieurs sortant des écoles spécialisées paraît de plus en plus insuffisante. L'harmonisation des diplômes dans le cadre de la Communauté Européenne représente un problème supplémentaire. Bien que les écoles spécialisées de commerce et d'ingénieurs donnent accès à des fonctions équivalentes à celle des diplômés des écoles supérieures à l'étranger, elles ne sont pas être reconnues de la même manière compte tenu de la durée plus courte de l'enseignement général.
C'est dans ce contexte que s'inscrit la réforme structurelle du système d'enseignement supérieur. Entre 1968 et 1971, les écoles spécialisées d'enseignement secondaire sont transformées en Fachhochschule (FH) et constituent ainsi une structure intermédiaire entre la formation universitaire et la formation en alternance. Elles font partie de l'enseignement supérieur mais, à la différence des IUT en France, elles n'exigent pas le baccalauréat (Abitur) à l'entrée mais valident de la même façon une qualification professionnelle. Outre les baccalauréats techniques et économiques spécialement créés pour alimenter ce nouveau type d'enseignement supérieur, le brevet (après dix ans d'études) complété par une formation professionnelle en alternance donne également accès aux FH. Elles opèrent ainsi la synthèse entre la formation universitaire et la formation en alternance. Progressivement, avec l'émergence des FH, l'enseignement supérieur n'est plus limité à la seule orientation scientifique, mais admet aussi la transmission de connaissances appliquées.
Les nouveaux établissements doivent s'insérer dans un système d'enseignement supérieur qui exerce une influence considérable sur leurs évolutions. Ainsi, les IUT arrivant dans un paysage où il existe déjà une concurrence n'évoluent pas de la même manière que les FH qui constituent un nouveau type d'enseignement supérieur. On peut donc comparer les enseignements de différents pays en fonction de différents paramètres: l'intégration des diplômés dans le marché de travail, le niveau de recrutement et l'évolution ultérieure des carrières.
En France, à partir des années soixante-dix, on peut constater une multiplication des filières et des diplômes. En effet, outre l'augmentation du nombre d'écoles supérieures, de nouvelles maîtrises technologiques apparaissent dans les universités. En 1991, des Instituts universitaires professionnalisés (IUP) sont créés. Ils recrutent après une année universitaire ou de classes préparatoires réussies et la durée des études est de trois ans. L'enseignement théorique à orientation professionnelle est complété par un stage de six mois(4). Il s'agit d'un enseignement correspondant mieux que les IUT au modèle des FH en Allemagne. En effet, une difficulté des IUT à l'heure actuelle est la durée d'études de deux ans. D'une part, elle entrave la reconnaissance de ce cursus d'études à l'étranger et, par conséquent, les échanges avec des établissements d'enseignement supérieur dans d'autres pays européens. D'autre part, les diplômés des IUT se trouvent souvent bloqués dans leur carrière par rapport aux titulaires d'un diplôme de niveau bac +4. Ainsi un nombre croissant d'étudiants poursuit ses études à l'université ou dans des écoles supérieures. L'IUT devient donc de plus en plus un premier cycle universitaire qui présente cependant l'avantage à la fois d'obtenir un diplôme reconnu sur le marché du travail et d'éviter une classe préparatoire pour les écoles de commerce et d'ingénieurs.
Les FH, après un début assez difficile, se révèlent être un succès. Initialement, elles avaient comme seule mission l'enseignement et non pas la recherche. Depuis, les possibilités de faire de la recherche appliquée ont été instaurées et même renforcées. En effet, le doctorat étant désormais la condition de recrutement pour les professeurs de FH, ces derniers sont mieux formés à faire de la recherche. Aussi le nombre d'étudiants titulaires d'un baccalauréat général n'a-t-il cessé de croître. L'orientation pratique des études donne, en effet, une perspective professionnelle bien définie. L'insertion professionnelle est plus facile pour les diplômés des FH que pour les diplômés de l'université, ce qui, dans une période où la situation du marché de l'emploi est tendue, représente un avantage certain. Un autre attrait des FH sont les cursus d'études innovants. Certaines FH ont été les premières à établir des relations étroites non seulement avec les entreprises mais également avec des établissements d'enseignement équivalents à l'étranger. Par ailleurs, la validation d'études suivies à l'étranger attire un nombre croissant d'étudiants, les compétences internationales étant de plus en plus demandées. L'élévation de la qualification des enseignants, l'augmentation du niveau de recrutement des étudiants et la recherche ont donc contribué à rapprocher les FH des universités. À partir des années quatre-vingt, les FH s'imposent, en effet, en tant que véritable enseignement supérieur à côté des universités. Une question reste, cependant, ouverte: les FH vont-elles se rapprocher davantage des universités ou sont-elles capables de se forger un profil spécifique tout en s'adressant de plus en plus au même public que les universités? Paradoxalement, c'est justement le profil différent de l'université qui fait leur succès.
Les Fachhochschulen ont connu depuis une vingtaine d'années un très grand succès en Allemagne. Elles proposent un enseignement davantage axé sur la pratique et plus court que celui des universités mais cependant plus long de deux ans que celui des IUT. Recrutant non seulement après le bac mais également après une formation professionnelle en alternance, elles constituent un moyen de promotion sociale. En effet, les diplômés des Fachhochschulen s'intègrent bien dans le marché du travail. En ce qui concerne les offres d'emploi dans le secteur tertiaire, on cherche d'ailleurs souvent de façon indifférenciée des diplômés des universités et des Fachhochschulen pour le même poste. Le nombre de diplômés des FH qui occupent des fonctions dirigeantes dans grandes entreprises est également en nette progression. Cela est cependant moins vrai dans l'industrie.
Si les IUT n'ont pas connu le même succès que les Fachhochschulen, cela est dû, en premier lieu, à la dichotomie du système d'enseignement supérieur français et la multiplication des filières professionnalisantes qui proposent des diplômes de niveau bac +4 ou bac +5. Ainsi, les diplômés des IUT ont avant tout accès aux fonctions d'encadrement intermédiaire et se trouvent rapidement bloqués dans leur carrière. En raison de la durée des études de deux ans, les IUT deviennent, en effet, de plus en plus un premier cycle qui permet de poursuivre les études dans un deuxième cycle professionnalisant. En outre, les échanges avec des établissements étrangers restent limités. Toutefois, le projet actuel d'offrir la possibilité d'une troisième année pourrait redynamiser l'évolution des IUT.
1 | La France procède à une réforme de l'enseignement secondaire en 1959. Cette réforme instaure pour le premier cycle une seule forme d'école afin de démocratiser l'enseignement secondaire. Cf. PROST, Antoine, Histoire générale de l'enseignement et de l'éducation en France, Nouvelle librairie de France, Paris, 1981, p. 257. |
2 | La formation professionnelle duale doit son nom à la dualité qu'elle recouvre: dualité des lieux de formation qui relèvent simultanément de l'économie privée et des pouvoirs publics et dualité des savoirs (pratique et théorique). |
3 | MÖBUS, Martine / SEVESTRE, Patrick, Formation professionnelle et emploi: une comparaison France-Allemagne, in: Problèmes économiques n°2.259, 22 janvier 1992, p. 11. |
4 | BOSMAN, K.-H., IUP, das französische Fachhochschulmodell? in: Die neue Hochschule, 4/94, p. 17-19. |
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